Zone rouge

Audi RS3 Sportback, Balle neuve

La plus turbulente des berlines compactes, la RS3, nous revient à travers une troisième génération. Elle ne change pas une formule qui plaît : elle l’améliore. Tout en elle est mieux, à commencer par son 5 cylindres « turbo » piqué au TT RS, mais pas seulement…

En bref
Troisième génération de RS3
Moteur : 5 cylindres 2.5 turbo de 400 ch
Performances : 0 à 100 km/h en 4,1 sec
250 km/h maxi (280 km/h en option)
Prix : 61 500 € (à partir de en Sportback)

On ne va pas se mentir : la première RS3 est une Audi RS ratée. Logique, dans la mesure où elle est née en 2012 dans la précipitation sur une base d’A3 Sportback de seconde génération, qui n’était pas du tout prévue pour une telle cure de vitamines. Le département sportif de l’époque, quattro GmbH, a été prié de réagir en urgence pour contrer les BMW 1M et M135i, et cela se voit… et se sent. Bien sûr, il y a un super moteur, déjà le 5 cylindres turbo, fort de 340 ch à l’époque. Mais visuellement, l’auto reste déséquilibrée, son train avant étant bizarrement bien plus large à l’avant qu’à l’arrière. Un curieux bricolage qui se perçoit en conduite rapide, avec un train avant trop lourd et sous-vireur.

Conscient de ces lacunes, Audi a corrigé le tir sur la génération suivante, où le principe de faire une variante « RS » a été intégré dès la gestation du modèle. Enfin séduisante, cette RS3 déclinée en une inédite berline tricorps, a cependant été vendue majoritairement en Sportback. Elle reste fidèle à l’inoxydable 5 cylindres, mais elle monte le curseur à 367 ch. Honnêtement, cette mouture nous a semblé aussi convaincante sur une petite route que décevante sur un circuit. Il n’y a rien à faire : avec tant de poids sur le train avant, la RS3 reste une super GT mais elle n’a pas l’agilité et l’équilibre d’une pistarde. Qu’en est-il de cette troisième et ultime mouture ? Réponse à travers ce premier essai, réalisé sur les routes de l’arrière-pays varois…

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La bataille du Rhin

Paradoxalement, à une époque où nous sommes de plus en plus bridés, brimés et « fliqués », il n’y a jamais eu autant de « pompes à feu ». Et cette escalade à la puissance a de quoi donner le tournis. En 1976, une Golf GTI faisait régner sa loi avec un 1.6 de… 110 ch. Aujourd’hui, la vénérable Golf GTI, 7ème du nom, développe au bas mot 230 ch, voire même 310 ch sur la méchante version « R ». Une puissance voisine pour la Seat Leon Cupra SC (300 ch), la Ford Focus RS (350 ch) dominant la catégorie… si l’on fait abstraction de la BMW M2 (370 ch) et de la Mercedes A 45 AMG (381 ch). C’est clairement ces deux dernières prétendantes « premium », comme par hasard toutes teutonnes, que vise la nouvelle RS3. Et au petit jeu puéril de « c’est moi qui ai la plus grosse », Audi va mettre tout le monde d’accord en dégainant à nouveau son 5 cylindres, mais poussé cette fois à 400 ch ! Le TT RS n’en revient toujours pas, et nous non plus, même si on a de la peine à cacher notre plaisir. Un plaisir qui risque malheureusement d’être bref, car il ne fait aucun doute qu’Audi est parvenu à jouer in-extremis les prolongations en devançant les contraintes d’homologation, les normes antipollution actuelles condamnant un tel moteur. Toujours dopé par un gros turbo, comme au bon vieux temps des Groupes B de rallye, ce 5 cylindres demeure une exception culturelle propre à Audi, puisque Fiat, Ford et même Volvo ont abandonné leur « 5 pattes » respectif. Pourtant Audi n’a pas ménagé ses efforts en se limitant à un simple changement de cartographie. En plus de recevoir un bas moteur tout en aluminium, ce bloc revu et corrigé gagne un vilebrequin allégé et de nombreuses pièces en magnésium. Résultat, comparé à la version de 367 ch, Audi annonce une perte record de 26 kg, au bénéfice du train avant. Pour mettre en valeur ce « concentré de génie civil », le constructeur propose un compartiment moteur tout en carbone, facturé 1400 €, auquel est « offert » en prime un relèvement de la vitesse maxi de 250 à 280 km/h. Du jamais vu sur une berline compacte !

Signée désormais par « Audi sport » (et non plus quattro GmbH), cette nouvelle RS3 rabaissée de 25 mm se laisse d’abord dévorer du regard. Elle est bien sûr développée à partir de l’A3 restylée, ce qui se perçoit au niveau des optiques, aux contours plus dynamiques qu’auparavant. Et en bonne « RS » qui se respecte, notre bombinette reçoit le « total look » qui va bien, avec « des jantes spécifiques qui claquent sa mère » comme dirait mon jeune filleul ! Et il a raison mon filleul. Je ne vais pas le contredire, puisque, de série, la RS3 reçoit des jantes en alliage de 19 pouces pour mieux remplir des ailes subtilement élargies (de 20 mm), mais aussi tous ces appendices qui font qu’une Audi RS est une RS. Les boucliers sont entièrement redessinés, et se trouvent percés par d’imposantes entrées d’air, tandis qu’à l’arrière, outre la présence d’un becquet de toit, un extracteur d’air peaufine l’aérodynamisme. Les deux grosses sorties d’échappement ovales apportent ce qu’il faut d’agressivité, la proue jouant elle aussi la carte du sport en se parant d’une calandre singleframe grillagée plus anguleuse. Un cocktail savoureux à choisir en noir, comme sur notre modèle d’essai, ou en argenté, et à déguster classiquement en version break Sportback, mais également en berline (20% des ventes de RS3), cette dernière carrosserie étant par ailleurs réservée à la version compétition-client « LMS » (à l’essai dès notre prochain numéro !). Et comme tout cocktail qui se respecte, il faut bien secouer l’ensemble avant de savourer. Une chose que la RS3 sait faire à merveille, dès que la route virevolte…

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Négociante en virages

Une fois à bord, on fait vite corps avec la machine, les sièges baquets « sport » en cuir surpiqué étant particulièrement enveloppants. On pourrait se délecter de la vue offerte sur ce « mobilier », particulièrement ergonomique et valorisant avec ses placages en carbone, mais la vue du petit volant à méplat habillé d’alcantara donne plutôt l’envie de l’empoigner et de rouler. Contact, pression sur le bouton « start » et le 5 cylindres explose au démarrage. La RS3 prend bruyamment vie, de même que les compteurs digitaux. Car à l’instar des A3 restylées, notre RS3 s’est évidemment mise au goût du jour, en recevant à son tour les phares full LED, le MMI avec la carte SIM et surtout le cockpit virtuel. Il a été quelque peu repensé pour l’occasion puisque, comme à bord du TT RS, il bénéficie d’un affichage spécifique, faisant par exemple figurer les « G » encaissés dans les virages, ou en accélération. Pousser fort, la RS3 sait faire, le « launch control » autorisant des départs « canons », surtout lorsque toutes les fonctions de l’Audi drive select sont verrouillées sur le mode « dynamic ». Avec elle, il est trop facile de devenir le « roi des feux rouges », la transmission intégrale quattro empêchant toute perte de motricité. Mais s’abaisser à un comportement aussi niais avec un tel engin, surtout en zone urbaine, ce serait gâcher…

Pour être digne de piloter une telle auto, c’est sur la route que cela doit se passer, de préférence sinueuse et déserte. Comme celle qui file du Paul Ricard vers la Ciotat par exemple, magnifique avec ses innombrables virages dégagés qui serpentent à travers les pins. Les accélérations sont foudroyantes (0 à 100 km/h en 4,1 sec), propres à plisser le bitume. Difficile, sur route ouverte, de rester « gaz ouverts » bien longtemps, tant la mise sur orbite se fait rapidement. En quelques secondes, on évolue sur une autre planète, réservée habituellement à quelques sportives de gros calibre. Et puis il y a cette sonorité extraordinaire, ponctuée de « psschit » dès que l’on rentre dans la plage du turbo, puis de légères pétarades à chaque rétrogradage. Trop facile à faire d’ailleurs, la boite S-tronic à 7 rapports se laissant piloter du bout des doigts, via des palettes. Là encore, même si on perçoit qu’il y a encore du poids sur le « nez » de l’auto, avec une plongée naturelle au freinage, les mouvements de caisse restent plutôt bien maitrisés, et la transmission quattro aide à transformer cette voiture en une vraie « négociante en virages ». Le conducteur va adorer, les passagers beaucoup moins, les passages dans les virages pouvant se faire à des allures inavouables. Car si la RS3 sait vous expédier vite fait, bien fait, dans une autre dimension, elle peut heureusement vous faire revenir sur terre rapidement, ses gros freins de 370 mm étant particulièrement efficaces. Et, chose unique dans la catégorie, la RS3 peut même recevoir à l’avant des disques en carbone-céramique, une option facturée 5400 €. Seul petit regret, un ressenti un peu artificiel au niveau de la direction, malgré son côté très direct. Quant au confort, il prend une sacré claque en mode dynamic, trop caricatural à notre goût pour être utilisé sur une route au revêtement dégradé. La Ciotat est déjà en ligne de mire : retour à la civilisation et arrêt du manège.

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L’avis d’Avus

L’ancienne RS3 de 367 ch nous avait déjà fait forte impression, du moins sur route, son comportement trop pataud n’étant pas à son avantage sur un circuit. Avec cette nouvelle mouture, plus affûtée que jamais, les performances progressent encore, l’agrément général également, mais ces défauts persistent. Mais pour une berline compacte qui se veut utilisable au quotidien, partout un chacun et par tout temps, est-ce vraiment un défaut ? Il ne faudrait pas se tromper de débat et prendre la RS3 pour ce qu’elle n’est pas : une pistarde extrême, capable de claquer un temps au Nürburgring. En revanche, pour qui recherche une auto vivante, très performante mais relativement discrète, de surcroît infatigable sur autoroute et sur route sinueuse, la RS3 se pose là en championne. Une polyvalence rare à ce niveau de performance, qui a bien sûr un coût en rapport, puisque la RS3 s’affiche à partir de 61 500 € en Sportback et 62 900 € en berline, hors malus rondelet de 9600 € bien évidemment.

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Les alternatives

BMW M2

La M2, c’est déjà une sacrée gueule, mais en plus un vrai moteur, avec un 6 cylindres en ligne 3.0 « turbo » de 370 ch. Légère et agile, cette propulsion rappelle les premières M3, ce qui est plutôt un compliment. Une réussite, à condition d’éviter la boîte DKG. A partir de 68 160 €

Mercedes A 45 AMG

L’A45 AMG est une maxi-GTI qui offre un rendement délirant, puisque son 4 cylindres 2.0 turbo développe désormais… 381 ch ! Pas de quoi impressionner pour autant notre RS3, même si l’ensemble est drôle et homogène. A partir de 55 350 €

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