Zone rouge

Audi RS6, 20 ans dans la zone rouge !

 

Un son rauque résonne dans les gorges sinueuses de l’arrière-pays niçois et à la sortie d’une épingle, une colonne de RS6 déferle sur le bitume provençal. A l’occasion des 20 ans de l’Audi RS6, Avus a décidé de revenir sur l’histoire de ce modèle mythique. A travers un parcours digne des spéciales de rallye, les mélodies graves des V8 et du V10 s’expriment librement. Cette réunion familiale a permis de faire un point autour d’une journée inoubliable. Une journée très… RS6 !

Par Jimmy Meloni, photos

En bref

20 ans d’Audi RS6
Comparatif exclusif
Générations S6 Plus, RS6 C5, C6, C7 et C8
Puisance : de 326 à 605 ch.

Depuis vingt ans, l’étonnante Audi RS6 est devenue une référence, ce grand break hors norme avalant l’asphalte sans complexe, en affichant des performances dignes d’une supercar. Ce modèle devenu mythique, qui porte fièrement les quatre anneaux, est apparu à l’été 2002. D’emblée, il posait son homme, en héritant d’un noble V8 de 450 chevaux. En version break Avant, l’une des spécialités de la marque aux anneaux, cette auto est apparue comme par enchantement sur le devant de la scène pour en mettre plein les yeux à la concurrence, qui à l’époque se concentrait sur les modèles germaniques comme Mercedes et BMW. Mais Audi n’est pas venu avec la RS6 par hasard… Presque dix ans plus tôt, la marque d’Ingolstadt avait élaboré un autre bolide tout aussi inclassable, sorti du cerveau géniale et fertile de Ferdinand Piëch, un… break dont la base était une Audi 80. En 1992, la RS2, construite en partenariat avec Porsche, utilisait le fameux cinq cylindres d’origine Audi, sauf que le gros turbo qui venait en renfort provenait de la 911. De quoi permettre à cette auto bien singulière d’atteindre les 315 chevaux et de proposer à son conducteur des sensations inédites sur un break familial, avec des poussées phénoménales et une vitesse de pointe dépassant les 260 km/h. Du jamais vu !

La fabuleuse dynastie RS était née et bien née. Bien que confidentielle, la RS2 s’est vite fait une place dans le cœur des passionnés de belles mécaniques, et elle s’est d’emblée hissée au niveau des meilleurs, notamment les Mercedes C63 AMG et les BMW M3, désignées comme des références à l’époque. C’est avec ce savoir-faire plus que prometteur que la RS6 est apparue à point-nommé au salon de Genève en 2002. Il était grand temps car la RS2 a tiré sa révérence en 1996, laissant Audi sans véritable modèle sportif à proposer à ses clients. La marque aux anneaux a donc l’idée de remettre le couvert et de fabriquer une « super RS2 », en partant cette fois d’un break A6 surpuissant. Porsche ayant déposé le sigle « RS », et refusant à Audi de l’exploiter à nouveau, la marque aux anneaux a trouvé une parade en le baptisant « S6 Plus ». Et cette fois, plus question de faire fabriquer ce nouveau bolide sur un site étranger, la S6 Plus étant assemblée par Audi, à Neckarsulm, en break bien sûr, mais aussi en berline, même si celle-ci restait minoritaire. Mais c’est au compte-goutte qu’Audi, épaulé par le département sportif quattro GmbH (devenu Audi Sport)-  et avec l’aide de Cosworth pour le moteur – a produit cette auto, sur une chaîne à part.

Un engin incroyable réservé à une petite élite qui offrait déjà une finition remarquable, n’hésitant pas à marier des inserts de carbone sur le mobilier, au cuir et à l’alcantara au niveau des sièges. Au final, seuls 952 exemplaires seront assemblés, ce qui reste bien peu. Autrement dit, il est difficile, voire très rare, de croiser un bel exemplaire sur les routes, surtout dans ce coloris typique, le fameux Bleu Nogaro si caractéristique étrenné par la mythique RS2. Il faut dire que ce grand break survitaminé ne s’adressait pas à tout le monde. Et pour cause ! Cette voiture restée confidentielle est entraînée par un V8 4,2 litres atmosphérique de 326 chevaux, soit 36 ch de plus que la S6 de l’époque. Il va de soit que ce déménageur de choc, d’abord conçu pour les grands espaces, se montre moins agile que de modèles plus compacts sur les portions sinueuses, son amortissement un peu trop souple nuisant au comportement. Par ailleurs, le poids important du moteur qui pèse sur le train avant lui ôtait de l’agilité dans les virages. Fort heureusement, la S6 Plus compensait en faisant montre d’un grip phénoménal, rançon de la transmission intégrale quattro qui était, faut-il le préciser, livrée ici d’office, comme ce le sera d’ailleurs sur tous les modèles RS. Produite sur une petite année entre 1996 et 1997, cette très méchante A6 aura été déclinée en berline et en break pour un montant qui avoisinait, à l’époque, les 500 000 francs… hors options ! Cette méconnue Audi S6 Plus est en quelque sorte le chaînant manquant entre la RS2, plus trapue et plus compacte, et les futures générations de RS6, bien plus spacieuses et puissantes.

Le mythe RS est en marche

Au fil des années 90, Audi a fabriqué une véritable histoire sportive grâce à ses modèles S et RS. C’est ainsi que la gamme RS6 a évolué au fil des remplacements des modèles A6, dépassant l’histoire de la marque pour devenir de véritables icônes auprès des clients. La première RS6 « type C5 », toujours aussi élégante avec sa carrosserie musclée tout en rondeurs, est dotée d’un moteur V8 biturbo de 450 chevaux. En 2002, ce niveau de puissance était phénoménal. Elle abattait le 0 à 100 km/h en 4,9 secondes, faisant de cette surprenante RS6 la mouture préférée des papas pressés… et des gros dealers pratiquants ce que l’on allait appeler les go-fast. Ce fleuron signé Audi, issu également des chaînes spécifiques de montage de l’usine de Neckarsulm, a été vendu à 8 081 exemplaires. Chaussée de grosses roues en alliage de 18 pouces, lovées dans des ailes subtilement élargies, elle demeure assez sobre en apparence mais laisse apparaître des sorties d’échappements ovales chromées et reçoit des coques de rétroviseurs en aluminium brossé, un élément de style distinctif qui sera la signature stylistique des modèles RS. Bien sûr, les pare-chocs sont modifiés, notamment celui situé à l’avant pour assurer un meilleur refroidissement des radiateurs à eau et à huile. Et l’intérieur a lui aussi droit à sa dose d’exclusivité, les sièges Recaro et le combiné d’instrumentations étant spécifiques à cette version sportive.

Pour suivre la chronologie des événements, nous passons d’un baquet à l’autre en suivant l’ordre d’apparition des modèles. Nous nous retrouverons donc dans la RS6 Plus. Cette version limitée à 999 exemplaires passe de 450 à 480 chevaux et tire pas moins de 550 Nm de couple. Le 0 à 100 km/h tombe à 4,6 secondes. Plus musclée, cette machine dont le tarif était de 101 500 euros, s’est vendu très rapidement dans une seule version, le break Avant, autre signature immuable de la lignée RS6. Il existe cependant, une berline, une seule, qui a vu le jour pour le grand plaisir d’un client autrichien. Mais il y a encore plus monstrueux, plus puissant, plus imposant : la RS6 C6, construite entre 2008 et 2010. Elle abrite en son sein un… V10 FSI biturbo Lamborghini issu de la Gallardo ! Ce monstre développe 580 chevaux, s’adjuge 650 Nm de couple à seulement 1 500 tr/mn et dépasse en puissance brute le moteur d’une Ferrari F430 Scuderia. Une armada de radiateurs équipe cette auto : pas moins de sept sont nécessaires pour refroidir le moteur !

Elle dispose d’une boite tiptronic à 6 rapports, la seule requise pour digérer tout le couple, avec malgré tout la possibilité de passer les vitesses manuellement grâce à des palettes situées à l’arrière du volant. Comme ses sœurs, la vitesse de pointe est bridée à 250 km/h, avec toutefois la possibilité d’atteindre les 280 km/h, un plaisir bien légitime qui reste malheureusement une option chez Audi. Du break à la berline il n’y a qu’un pas qu’Audi franchit en août 2008. L’auto est un peu plus légère en restant sous la barre symbolique des deux tonnes. Comme son aînée, une éphémère version Plus fait furtivement son apparition, pour le plaisir de seulement 500 privilégiés. Des privilégiés grisés par la vitesse, puisqu’elle dépasse les 300km/h. Même si la sonorité est magnifique, le plaisir est gâché par un train avant encore trop lourd et par des coûts d’entretien exorbitants.

RS ? La Race des Seigneurs

Après une pause, la troisième génération arrive dans les concessions en 2013. La RS6 C7 revient à des normes plus « modestes », l’écologie étant devenue une préoccupation de plus en plus présente chez tous les constructeurs. Audi fait donc du down-sizing et troque le V10 Lamborghini pour revenir au V8 biturbo. Partagé avec Porsche, Bentley et même Lamborghini pour son 4×4 Urus, c’est une 4 litres développant 560 chevaux. Ca va, on peut dire que l’honneur est sauf ! Car même si la puissance a diminué, l’auto assure de meilleures performances. Elle abat désormais le 0 à 100 km/h en 3,9 secondes. Mieux, son pack dynamique optionnel permet de dépasser la barre symbolique des 300 km/h. Et pour se montrer plus respectueuse de l’environnement, elle met en avant une certaine sobriété qui manquait cruellement à la version V10. En effet, à faible vitesse, le moteur coupe automatiquement la moitié de ses cylindres (système CoD, Cylinder On Demand). La consommation est ainsi sensiblement réduite si on roule pied léger. Mais ce qui se voit avant tout sur cette génération de RS6, c’est le changement de style. Elle reprend bien sûr la nouvelle robe de l’A6, de plus en plus musclée et suggestive. Ainsi la calandre single frame s’affirme beaucoup plus et les optiques sont plus effilés. Il n’y a pas à dire, c’est une réussite ! Et Audi osera même dégainer une version « Performance », montant le curseur à… 605 ch !

Fin 2019, la RS6 C7 tire sa référence laissant la place un an plus tard à la nouvelle et ultime mouture qui reprend les codes génétiques de cette super sportive. Mais en forçant sensiblement le trait. L’allure est davantage trapue, à l’image d’un break de chasse. Et la carrosserie, spécifique à 80% par rapport à une A6 Avant « normale » tant elle est différente, étonne par son agressivité. Dans la salle des machines, on retrouve le V8 biturbo de 4.0 litres (toujours avec désactivation des cylindres), mais plus puissant que sur la version précédente de 40 chevaux. La puissance totale grimpe alors à 600 chevaux, pour un couple de remorqueur de… 800 Nm ! Voilà de quoi garantir des reprises phénoménales même si la bête, suréquipée et dotée d’une finition toujours aussi irréprochable, pèse plus de deux tonnes. La boite automatique à huit rapports, imposée d’office pour digérer tout le couple, permet de prendre rapidement le large, les vitesses passants sur un claquement de doigt, en douceur. Jamais on n’a vue une telle masse se déplacer aussi énergiquement, avec autant d’élégance : cette RS6 ne met que 3,6 secondes pour atteindre les 100 km/h. En vous collant le sourire en plus, le système quattro se montrant enfin permissif, pour rendre la conduite plus ludique. Et si le cœur vous en dit, et que vous êtes dans vos bons jours, il vous faudra à peine 12 secondes pour que l’aiguille indique les 200 km/h. A partir de là, en restant « soudé » sur la pédale de droite, la RS6 peut rejoindre les 280 km/h. Et même plus si affinités, car grâce au pack RS Dynamique Plus, les limites sont repoussées à 305 km/h. Il vous faudra juste compter 11 000 euros supplémentaires avec en prime les freins céramiques.

L’avis d’Avus

Cette réunion familiale inédite n’a pas valeur de comparatif, mais elle a permis de mettre en lumière l’extraordinaire richesse des RS6. Et leur formidable évolution génération après génération, vers toujours plus de puissance, d’efficacité, de performances, de style et de plaisir de conduite. A la fois polyvalentes et sportives, ces Audi familiales hors-normes, souvent carrossées en break, ont su tenir une place à part dans le monde de l’automobile. Mais surtout, elles ont enchanté des générations de passionnés. Car n’oublions pas que ce sont les conducteurs de ces formidables machines, célébrités ou inconnus, qui ont forgé à coup de louanges la réputation en acier inoxydable de ces fantastiques autos. Des autos qui demeureront au sommet de la hiérarchie automobile, tant qu’il y aura des hommes et du pétrole…

 

Fiches techniques :

 

RS6 C5 (2002-2004)

Moteur  V8 à 90°, biturbo
Cylindrée 4172 cm³
Puissance 450 ch
Couple 560Nm
Transmission Intégrale quattro
Poids à vide    berline 1667 kg
Avant 1865 kg
Accélération 0 à 100km/h 4,9 s
Consommation mixte 14,6 litres
 

RS6 C6 (2008-2010)

Moteur V10 à 90°
Cylindrée 4991 cm³
Puissance 580 ch
Couple 650 Nm
Transmission Intégrale quattro
Boite auto ZF
Poids à vide 2 025 kg
Accélération 0 à 100km/h en 4,6 s
Consommation mixte 13,9 litres

RS6 C7 (2012-2019)

Moteur V8 4,0 litres biturbo
Cylindrée 3 993 cm³
Puissance 560 ch
Couple 700Nm
Transmission Intégrale quattro
Boite de vitesse Automatique tiptronic 8 rapports
Poids à vide 1 895 kg
Vitesse maxi 280 à 305 km/h
Accélération 0 à 100 km/h en 3,9 à 3,7 s
Consommation mixte 9,8 litres

RS6 C8 (depuis 2020)

Moteur V8 4.0 litres biturbo
Cylindrée 3 996 cm³
Puissance 600 ch
Couple : 800 Nm
Transmission intégrale
Boite de vitesse automatique séquentielle 8 rapports.
Poids à vide 2 150 kg
Vitesse maxi 250km/h
Accélération 0 à 100 km/h en 3,6 s
Consommation mixte 12,5 litres

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