C’était demain
L’Audi A2 fête ses 25 ans ! Cela paraît à peine croyable tant cette voiture maligne était en avance sur son temps. Gros plan sur cette surdouée aux Anneaux…
Texte et photos Joseph Bonabaud
En bref
25 ans d’Audi A2
Poids de 895 à 1070 kg selon version
Production (2000 – 2005) : 176 205 exemplaires
Modèle essayé : 1.4 TDI 75 ch
Etre trop en avance sur son temps n’est pas toujours un gage de réussite, notamment en automobile. Souvenez-vous des novatrices Chrysler Airflow, Tucker, NSU Ro 80 ou Matra Rancho. Toutes ont apporté quelque chose de majeur à leur époque, mais sont tombées dans l’oubli. D’ailleurs, qui se souviendra, dans 25 ans, de la petite A2 ? Vingt-cinq ans, c’est précisément l’anniversaire que cette Audi apparue en juillet 2000, petite par la taille (3m82), mais immense par le talent, célèbre cette année. Car si l’on devait poser le cahier des charges de la voiture idéale aujourd’hui, il diffèrerait finalement de très peu de celui de cette A2. Dans les grandes lignes, l’idée est d’offrir une habitabilité maximale dans un gabarit réduit, chose obtenue ici en retenant la formule monocorps pour optimiser la place à bord. Et pour y parvenir, l’architecture la plus judicieuse est celle d’une traction avant (pour supprimer l’arbre de transmission), et l’implantation d’un petit moteur, transversalement.
› Avec l’A2, Audi est venu se frotter à la Mercedes Classe A sur le segment des monospaces « premium ». Peugeot s’y aventurera aussi, sans grand succès, avec sa curieuse 1007 à portes coulissantes.
Bien sûr, afin de réduire au possible la consommation – et donc par corolaire direct les émissions de CO2 – le design doit être le plus fluide possible, afin d’offrir le meilleur coefficient de pénétration dans l’air. Et pour maximiser le résultat, le choix d’un matériau très léger s’impose (en l’occurrence de l’aluminium dans le cas présent), car moins une auto est lourde, et moins le moteur a besoin de faire d’efforts pour faire avancer l’équipage. Dans le cas de l’A2, Audi avance un Cx de 0,28, ce qui représentait une prouesse pour l’époque, surtout sur un véhicule aussi haut (1m55). En faisant un bond en 2025, force est de constater que peu de voitures parviennent à cocher toutes ces bonnes cases. Certains, grâce à la technologie électrique qui est par définition « zéro émission » tentent de s’affranchir des questions inhérentes au poids, et ce d’autant plus que le législateur impose toujours plus de dispositifs sécuritaires ou de dépollution pour répondre aux dernières normes. Un cercle finalement peu vertueux qui explique -en partie – pourquoi la moindre citadine moderne pèse, au bas mot, plus de 1500 kg. Les choses étant posées, il convient désormais de mettre tout cela en perspective avec les valeurs de l’A2 qui nous intéresse. Malgré sa vocation familiale, ce petit monospace n’accuse en moyenne que 1000 kg sur la balance !
Jaune et jolie
L’A2, on aime ou pas, mais c’est d’abord un physique. Une ligne monocorps d’une grande pureté signée Peter Schreyer, avec un avant lisse et bombé qui n’est pas sans rappeler l’iconique TT avec ses optiques affleurantes. Avec une originalité en plus, la calandre pleine pouvant basculer d’un seul tenant, afin de pouvoir accéder aux goulottes de remplissage pour faire les appoints de fluides. Pourquoi ne pas ouvrir bêtement le capot me direz-vous ? Et bien parce que celui-ci est fixe (accessible qu’en atelier), signe d’une grande confiance dans les mécaniques disponibles. C’est sur ce point que l’A2 commence à accuser le poids des ans. En effet, en marge de classiques blocs essence (1,4 de 75 ch et 1,6 FSI de 110 ch), sachez qu’elle osait proposer, comme sur notre superbe modèle d’essai « Strom » de 2003, un 3 cylindres… 1.4 TDI de 75 ch. Mieux, une version plus performante de 90 ch était aussi disponible, mais également un 1.2 TDI de seulement 61 ch promettant une conso record de seulement 3 l/100 km. Voilà un choix technique désormais impensable sur une auto de ce gabarit, à vocation péri-urbaine. Mais pas que, l’A2 n’ayant pas peur des grands trajets.
› A l’instar d’une limousine A8, l’A2 exploite à fond l’aluminium à travers une structure ASF, clé de la légèreté.
A2 doigts du succès !
Retrouver le volant d’une A2 me replonge… 25 ans en arrière, lorsque j’ai eu la chance de participer à son lancement organisé dans le sud de la France. Force est de constater que tout vieillit parfaitement bien à bord, qu’il s’agisse des plastiques moussés ou des garnitures des sièges, signe d’une excellente qualité de fabrication. Dès l’ouverture des portes, un sigle estampillé « ASF » attire mon regard, celui-ci voulant dire « Audi Space Frame ». En clair, cette A2 est majoritairement construite en aluminium, comme une prestigieuse A8 de l’époque. Un choix technique pertinent sur le papier… mais qui sera à la source de son échec commercial. Car utiliser de l’aluminium plutôt que de l’acier classique, augmentait le coût de fabrication, et donc le prix de vente de cette Audi, souvent vendue en « seconde voiture » dans les foyers les plus fortunés. Avec un prix de départ fixé à 129 900 francs, l’A2 venait dangereusement empiéter sur les platebandes de l’A3, plus classique de conception, mais plus tendance. Et en cas d’accrochage, même bénin, cela imposait de consulter un spécialiste de l’aluminium, ce qui revenait horriblement cher pour la moindre remise en état. Une démarche qui a du sens sur une luxueuse A8, mais nettement moins sur une petite A2.
› Qualité et ergonomie sont bien au rendez-vous.
Dommage, car à l’usage, cette A2 reste agréable à bien des égards. Bien sûr, le grognement émis par son TDI n’est pas son meilleur allié, et à moins d’être un gros rouleur, mieux vaut se tourner vers un bloc essence. Au chapitre des griefs, je terminerai par un angle mort important généré par le montant de parebrise assez reculé, et une rétrovision problématique, imposant le recours au radar de recul heureusement proposé en option. Aujourd’hui, nul doute qu’une caméra de recul solutionnerait avantageusement ce problème. Sur route, une fois chaud et bien lancé, le 3 cylindres sait se faire oublier. L’amortissement « pompe » un peu sur les bosses, mais en contrepartie, le confort reste de bon niveau, et cette souplesse contraste avec la fermeté des sièges. Quant à la boîte manuelle à 5 rapports, elle demeure bien guidée et étagée. Avec des « si », on pourrait mettre Paris en bouteille, mais je me dis que cette A2 restée sans descendance directe n’est pas passée loin du succès. La baisse significative du prix à 115 400 francs dès 2001 ne parviendra pas à enrayer sa chute. Mais le temps qui passe semble donner raison à cette A2, désormais très recherchée en occasion. Ce n’est que justice !
› L’A2 est restée, en l’état, sans descendante directe. Audi préfèrera assurer en lançant la plus conventionnelle A1.
L’avis d’Avus
L’A2 a su voilà 25 ans mettre dans le mille dans bien des domaines, et il suffirait de peu pour l’adapter aux exigences de notre époque. On la verrait bien être proposée en hybride-essence et en full électrique, avec une carrosserie en composite afin de préserver sa légèreté, tout en rendant les interventions moins onéreuses. Et pour répondre aux attentes de la clientèle de 2025, il suffirait d’intégrer un grand écran tactile multifonctions afin de la mettre « à la page ». Bien peu de choses en somme. Clairement, avec l’A2, « c’était demain » !
« Avec des « si », on pourrait mettre Paris en bouteille, mais je me dis que cette A2 restée sans descendance directe n’est pas passée loin du succès »
On aime:
• Voiture techniquement brillante
• Consommation modérée
• Poids modéré
On aime moins:
• Diesel plus adapté
• Amortissement souple
• Rétrovision
Fiche technique Audi A2 1.4 TDI 75:
Moteur : 3 cylindres en ligne turbo-diesel de 1422 cm3
Puissance (ch à tr/mn) : 75 à 4000
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 195 à 2200
Transmission : aux roues avant
Boîte de vitesses : mécanique à 5 rapports
Freinage : disques ventilés (à l’avant), tambours, ABS et EBV
Pneus : 175/60 VR 15 à l’avant et à l’arrière.
Dimensions (L x l x h) : 3m83 x 1m67 x 1m55
Empattement : 2m41
Poids à vide (kg) : 990
Coffre (en litres, mini/maxi) : 390/1140
Réservoir (en litres) : 34 litres
Vitesse maxi : 173 km/h
0 à 100 km/h : 12,3 sec