Un p’tit truc en plus
Depuis l’arrêt de la R8 mais aussi des grosses Audi siglées « RS », charge à l’e-tron GT de faire vibrer notre fibre émotionnelle. Une mission impossible pour une électrique? Ce serait mal connaître cette déclinaison RS Performance, qui a vraiment un p’tit truc en plus…
Texte et photos Thomas Riaud
En bref
Version restylée de l’e-tron GT
Nouvelles batteries, nouveaux moteurs plus puissants
Version RS Performance à l’essai de 843 ch avec « boost » temporaire de 81 ch
Prix (à partir de) : 175 350 €
Attention : voici une voiture électrique qui risque bien de vous faire aimer l’électrique. Oui, c’est bien moi, petrol head invétéré, qui écris cela, ce qui ne donne que plus de poids et de valeurs à mon propos. Bon, d’accord, on ne parle pas ici d’une Citroën AMI ou d’un autre immonde déplaçoir à piles. Dans le cas présent, vous aurez reconnu l’e-tron GT, un modèle de pointe qui partage sa technologie avec la Porsche Taycan, une berline 100% électrique qui n’a rien d’un laideron, et qui n’a pas vraiment la réputation de se traîner. Mais, sans être inféodé à Audi, je le dis ici librement, je trouve que cette e-tron GT est encore plus jolie à regarder, et ce, sous n’importe quel angle. C’est le chef d’œuvre de Marc Lichte, et il peut être fier de sa création. Basse, longue (4m99), large (1m96 hors rétro), musclée et trapue, on peut dire que cette sculpture sur roues de 21 pouces « en jette », et il suffit d’observer la tête des badauds se dévisser sur son passage pour s’en assurer.
› Difficile de toucher à un tel chef d’œuvre, si bien que ce restylage reste assez discret sur la forme.
D’ailleurs, la plus belle preuve de la justesse de ce dessin est que, pour son premier restylage opéré fin 2024, les designers d’Audi y sont allés tout doucement, en restant dans la retenue. Il est vrai qu’il est difficile d’améliorer la Joconde ! Question look, l’e-tron GT évolue donc à la marge, en se limitant à l’ajout de nouvelles couleurs, mais aussi la possibilité d’opter pour un ensemble Carbon Camouflage inédit (comme sur notre modèle d’essai), la version de pointe RS Performance coiffant la gamme bénéficiant en plus de quelques éléments distincts, notamment une lame verticale façon F1 située au centre du bouclier arrière.
Au top de la technologie
Techniquement, les modifications sont en revanche bien plus importantes. La batterie, de plus grande capacité (105 kWh), utilise des cellules LG dernier-cri, permettant de pousser l’autonomie à 560 km (WLTP), mais surtout d’accepter des recharges éclairs qui changent la vie, en pouvant encaisser jusqu’à 320 kW. De quoi récupérer de 10 à 80% de charge en seulement 18 minutes… à condition d’avoir accès bien sûr à un superchargeur. Une condition qui n’est qu’une formalité en restant sur l’autoroute mais qui, comme vous le verrez plus loin, n’est pas toujours évidente dès que l’on navigue en « France profonde », loin de ce type d’infrastructure. Cela étant, dans ce cas de figure, on peut compter sur le chargeur embarqué livré de série qui encaisse jusqu’à 22 kW en courant alternatif. Avec ses moteurs inédits, l’e-tron GT vise encore plus haut et propose des niveaux de puissance encore jamais vus sur une Audi de série, reléguant presque une R8 V10 au rang de jouet pour fillette.
› L’intérieur fait moins « high-tech » que dans les dernières Audi, mais il offre un bon compromis entre modernité et classicisme, et surtout, l’ergonomie est plus intuitive.
Ainsi, la version de base (qui développait 476 ch) en offre désormais 591 ch, tandis que la RS (qui était jadis le haut de gamme), passe de 598 ch à 775 ch. Audi aurait pu s’arrêter là mais propose en plus une version RS Performance diabolique ici à l’essai, délivrant 843 ch, et même 81 ch de plus durant 10 secondes pour les plus énervés, si l’on sollicite le bien-nommé mode « boost ». De quoi crever le plafond des 900 ch, une puissance de feu digne d’une F1, le tout dans une voiture de série. Cela implique un niveau de confort de haut niveau, ce qui est le cas. Matériaux soignés et ajustages millimétrés donnent à cette e-tron GT un réel statut premium. Là où on voit en revanche qu’elle commence à avoir un peu de bouteille, c’est au niveau de sa planche de bord, qui doit se limiter à un cockpit virtuel paramétrable, et un simple écran central de 10,1 pouces. Ca change des derniers modèles disposant d’une « scène numérique », mais je dois avouer que je préfère cet agencement, surtout que de nombreux boutons physiques demeurent présents, rendant leur utilisation plus intuitive. Mes seuls reproches se limiteront à un manque d’espaces de rangement à bord, et à une garde au toit un peu juste aux places arrière, rançon d’une ligne sculpturale qui s’inspire des coupés. Quant au coffre, il donne dans l’acceptable (350 dm3), un autre espace de rangement de 85 dm3 étant logé sous le capot (pour ranger les câbles). Mais j’ai gardé le meilleur pour la fin, à savoir l’apparition d’une option inédite que je recommande absolument : une suspension active pilotée, à l’efficacité incroyable.
Double personnalité
Celle-ci se manifeste dès que l’on effleure la poignée de porte, où l’auto s’élève de 55 mm afin de faciliter son accès à bord. La voiture étant naturellement très basse (1m41), cela n’a rien d’un gadget. Mais au-delà d’offrir un confort de très haut niveau, cette suspension « magique » présente bien d’autres avantages pour une auto accusant 2,4 t sur la balance, comme contrer le roulis, mais aussi les effets de cabrage et de plongée, en offrant une amplitude de 2,2 cm. En clair, ce dispositif permet de conserver une assiette stable, et donc de repousser les lois de la physique dans les virages. Là encore, cette option n’a rien d’un gadget, car l’e-tron GT RS Performance est capable d’affoler les chronos d’une force que vous n’imaginez même pas ! Pour réaliser mon essai, j’ai eu la bonne idée d’aller en Normandie rendre visite à Jocelyn, un ami d’enfance, lui-même petrol head assidu. Le jour de ma venue, le bougre venait de s’acheter un nouveau jouet extraordinaire, la petite Toyota Yaris GR qui tient plus de la voiture de rallye homologuée pour la route que de la citadine sportive. Je lui ai simplement dit que je venais le voir en voiture électrique, ce qui n’a pas manqué de déclencher de gentilles moqueries de cet affreux Jojo. Bon, en arrivant chez lui, il a déjà changé de ton en découvrant ma monture et en succombant, lui aussi, à sa plastique ravageuse. Mais l’histoire a pris une tournure comique lorsque je lui ai dit d’en faire le tour et de bien la regarder, car il n’aurait aucune chance de suivre le rythme avec sa petite GR. Interloqué par tant d’audace de ma part, il s’est glissé à mes côtés dans le siège passager.
› Faire un « launch-control » en sollicitant toute la cavalerie est un exercice presque physiquement difficile à supporter, tant l’accélération est violente !
En quittant le village, je me suis astreint à rouler sagement à une vitesse de sénateur, en lui faisant faire le « tour du propriétaire ». Dans ces conditions, même en roulant sur un bitume plein d’imperfections, l’amortissement fait déjà des merveilles, et le bruit discret émis par la voiture ne laisse absolument pas présager ce dont elle est capable. Clairement, elle cache bien son jeu ! Mais en pleine campagne, en arrivant sur une section large et déserte, je me suis arrêté en le regardant, sourire en coin. Pied gauche sur le frein en mode Dynamic, je sollicite le mode « RS Performance » et appuie sur le bouton « boost » situé sur le volant pour convoquer toute la cavalerie. Un bourdonnement résonne dans l’habitacle, signe que tout est sous tension, prêt à l’emploi. Je lui demande s’il est prêt, il acquiesce et, d’un coup, je soulage la pédale des freins.
› L’e-tron GT « cru 2025 » reçoit de nouvelles batteries et des moteurs plus performants, mais elle propose aussi en option une suspension hydro-pneumatique à l’efficacité redoutable.
Top Gun
Sans aucun effet de latence, l’e-tron GT s’arrache avec violence du sol, prête à plisser le bitume des 4 roues tant l’accélération est violente, nous plaquant sans ménagement au fond des sièges baquets au point de nous faire sentir l’utilité des appuie-têtes. Jocelyn n’aura qu’un seul mot en lâchant naturellement un « Oh put… ! » venant du cœur. L’accélération, plus proche d’un manège à sensations genre Space Mountain que celui d’une voiture est juste dingue (0 à 100 km/h en…2,5 sec !). En une poignée de secondes je me retrouve déjà à des vitesses que la bonne morale réprouve, sans éprouver de difficultés particulières, la voiture restant d’une stabilité remarquable. Une stabilité même pas prise en défaut en enchaînant une succession de grands « S » en virant à plat, l’e-tron réagissant avec une immédiateté déconcertante en sortie de virage dès que je remets un peu de gaz. Et pour calmer le jeu, ce missile peut compter sur la présence de freins en carbone-céramique, donnant l’impression de jeter l’ancre.
› Avec un niveau de puissance atteignant les 925 ch, cette Audi « à watts » surclasse en performances pures une R8 V10 Plus. C’est dire le niveau atteint !
Après 10 minutes à ce rythme d’enfer, c’est presque étourdi, et complètement bluffé par le niveau de performance stratosphérique de cette Audi digne de Top Gun que Jocelyn en descend, en me disant simplement que « si toutes les voitures électriques sont comme celles-ci, je signe tout de suite ». Malheureusement, excepté quelques OVNI également au top de la technologie (Porsche Taycan Turbo S, Tesla Model S Plaid…), cette e-tron GT RS Performance reste une exception. Avec quelques contraintes propres aux VE, comme celui d’effectuer une recharge en pleine campagne, un exercice réclamant de la patience sur une borne de 22 kW mieux calibrée pour une Zoé que pour ce « faucon millénaire » sur roues. Car évidemment, s’il est possible de parcourir environ 450 km en roulant normalement (consommation moyenne de 21 kWh), l’autonomie fond comme neige au soleil dès que l’on commence à jouer avec…
L’avis d’Avus
Au-delà de son design ravageur, je n’ai pas aimé cette e-tron GT RS Performance, mais je l’ai adorée ! Oui, il est possible de prendre un plaisir infini au volant d’une voiture électrique, celle-ci offrant des performances incroyables, et un comportement qui l’est tout autant. Et recharger n’est même plus une contrainte… si l’on navigue régulièrement à proximité d’une borne de recharge rapide. Dommage que cette excellence se monnaye au prix fort, cette Audi fantastique, la plus performante qu’il m’a été donné d’essayer, s’affichant au minimum 175 300 € sans option.
« L’accélération, plus proche d’un manège à sensations genre Space Mountain que celui d’une voiture est juste dingue. »
On aime:
• Ligne sublime
• Performances incroyables
• Comportement agile, sûr et plaisant
• Habitacle ergonomique et bien fini
On aime moins:
• Prix élevé
• Recharge au top… sauf sur bornes « normales »
• Garde au toit un peu juste à l’arrière
Fiche technique Audi e-tron GT RS Performance:
Moteur : un moteur électrique synchrones à aimants par essieu
Batterie : lithium-ion NMC de 105 kWh (95 kWh brut)
Puissance du chargeur AC – DC : 22 kW – 320 kW
Consommation mixte (WLTP) : 19,9 kWh/100 km
Autonomie (WLTP) : 560 km
Puissance (ch) : 843 ch (925 avec boost)
Couple : 895 Nm (1027 Nm avec boost)
Transmission : automatique à 2 rapports, aux 4 roues (quattro)
Dimensions (L x l x h en m) : 4,99 x 1,96, x 1,41
Pneus AV-AR : 265/35 ZR 21 – 305/35 ZR 21
Poids à vide (kg) : 2395
0 à 100 km/h (sec) : 2,8 (2,5 sec avec « boost »)
Vitesse maxi (km/h) : 250
Rejets de CO2 (g/km) : 0